Dossier destiné aux Internes et externes Médecine/Pharmacie (option Biologie)
(Présenté par Camille Rouvet et Cécile Guénot, Internes en Biologie Médicale, avril 2016)
Vous êtes au poste de validation biologique des résultats du laboratoire
Les dossiers apparaissent successivement sur votre écran de validation
Celui-ci apparaît :

Question 1.
Commentez cet hémogramme (= listez les anomalies de la NFS que vous devez valider)
Réponse
Anomalies leucocytaires : hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles, avec lymphopénie
Anomalies érythrocytaires : anémie microcytaire, normochrome
Anomalies plaquettaires : thrombocytose modérée.
Question 2.
Une ou plusieurs hypothèses diagnostiques peuvent être proposées dans le cas présent. Pour justifier votre démarche diagnostique, précisez :
D’abord avec l’analyse des anomalies érythrocytaires, ce qui vous a permis d’évoquer ou au contraire d’exclure telle ou telle cause possible de l’anémie (paramètres érythrocytaires déterminants pour le diagnostic de ce patient ?)
Puis en analysant les autres anomalies de l’hémogramme.
Réponse portant sur les anomalies érythrocytaires.
Anémie chronique avec diminution parallèle de l’anémie et du VGM, en l’espace d’environ 3 mois.
L’anémie était modérée et normocytaire il y a 3 mois : on exclut une hémoglobinose microcytaire.
Il s’agit donc d’une anémie microcytaire acquise, qui a 2 origines :
- L’anémie par manque de fer est la première cause à évoquer, car la plus fréquente (1/4 de la population mondiale concernée) : habituellement on note une diminution proportionnelle de l’hémoglobine, du VGM et de la CCMH. Ici la CCMH est normale, inhabituelle pour la valeur de VGM de ce patient (on attendrait une CCMH = 29-30 g/dL pour une carence par manque de fer ayant cette valeur de VGM).
- L’anémie des maladies chroniques (liée à un défaut d’utilisation du fer = inflammation chronique) est d’abord normochrome normocytaire puis devient microcytaire chez un ptient sur trois si l’inflammation se poursuit, avec hypochromie (souvent moins franche que pour la carence martiale vraie).
Réponse portant sur les anomalies leucocytaires.
Polynucléose neutrophile et thrombocytose ont de multiples causes, mais principalement le stress (très nombreuses maladies sévères nécessitant un accueil aux urgences ; mais valeurs un peu élevées ici), ou l’infection/inflammation sont à mettre en avant.
La myélémie est inconstante dans l’infection, et est absente dans l’inflammation.
La lymphopénie est nette. Elle a plusieurs causes possibles : associée à une pancytopénie (chimiothérapies), infection virale, corticothérapie à fortes doses.
En service d’urgence/réanimation, l’association polynucléose-lymphopénie évoque une infection sévère (libération de cortisol provoquant la lymphopénie : une lymphopénie > 0.9 G/L est péjorative dans ce contexte).
Question 3.
Quelles hypothèses diagnostiques proposez-vous en intégrant les diverses anomalies de l’hémogramme ?
Réponse : hypothèses diagnostiques.
La maladie de ce patient n’est sans doute pas récente :
- une exploration il y a 2.9 mois (NFS antérieure) avait objectivé une anémie modérée normochrome normocytaire ;
- la maladie a évolué : l’anémie s’est accentuée et est devenue microcytaire. Anémie d’une maladie chronique ?
- La polynucléose neutrophile et la thrombocytose observées ce jour ne vont pas contre l’hypothèse d’une inflammation sévère. La lymphopénie + polynucléose neutrophile oriente cependant plus vers un état infectieux qu’inflammatoire.
HDLM.
Ancien boucher, alcoolo-tabagique, il a pour antécédent une pancréatite chronique et des crises de pancréatite aiguë.
Se présente aujourd’hui aux urgences pour des douleurs épigastriques.
Il s’agit d’une récidive de pancréatite aiguë de grade D, pour laquelle il sera hospitalisé dans le service d’hépato-gastroentérologie. Le fibrinogène s’élève à 5,49 g/L (N : 2-4 g/L), la CRP est à 76 mg/L (N : < 5 mg/L). Une lipasémie à 151 UI/L est retrouvée (N : 8-78 UI/L).
Les symptômes s’améliorent avec une reprise de l'alimentation progressive. Une consultation avec réévaluation à distance est prévue pour discuter d'une éventuelle prothèse pancréatique, ainsi qu’un suivi avec un tabacologue.
La sémiologie de l’hémogramme est en accord avec la situation clinique : état inflammatoire sévère chez un patient ayant une maladie chronique.
Absence d’argument clinique en faveur d’un état infectieux (aucune antibiothérapie instaurée chez ce patient)
Remarques.
D’autres hypothèses diagnostiques sont envisageables, mais dans un premier temps il faut aller à l’essentiel (= les situations les plus fréquentes).
Par exemple si la situation clinique avait été incompatible avec les hypothèses évoquées, on devrait alors penser à :
- une erreur ou un oubli dans la démarche biologique (situation la plus fréquente)
- une situation inhabituelle, rare ou exceptionnelle (permet d’améliorer ses connaissances, de publier…)