Suite de l’observation 38a
Rappel. Myélome multiple stade III (ISS), diagnostiqué chez une patiente de 69 ans
Patiente traitée initialement par alkéran + prednisone + biphosphonate
Amélioration après quelques mois de traitement, puis apparition rapide d’une anémie profonde (Hb = 5.6 g/dL) avec remontée quantitative du pic Ig sérique : réciive du myélome
Traitement arrêté et remplacé par imide (thalidomide) + EPO.
Six mois plus tard une hyperleucocytose avec présence de cellules anormales est objectivée.

l'anémie est quasi absente, avec macrocytose très discrète
Il n'y a pas de neutropénie ou de thrombopénie
La technicienne a observé 89 % de cellules anormales qu'elle a classées en blastes

Faible grossissement
Nombreuses cellules anormales

Faible grossissement

Fort grossissement

Les cellules anormales correspondent à des blastes :
taille moyenne avec rapport N/C élevé
nucléole parfois visible
contour nucléaire régulier (souvent) ou non (parfois)
pas d’inclusions cytoplasmiques






Aucune cellule évoquant des plasmocytes

L'aspect ne correspond pas à celui d'une leucémie à plasmocytes
Si la blastose est conséquente, on remarque qu'elle n'est pas associée à des cytopénies.

La moelle osseuse
Faible grossissement

Grossissement intermédiaire
Les mégacaryocytes étaient peu représentés (malgré une N° plaquettaire normale), mais ceux que l’on observait étaient anormaux.
Ici un mégacaryocyte de taille moyenne avec noyau bilobé (aspect évocateur de myélodysplasie)
LAM 0 : blastes indifférenciés

Les blastes (71% au myélogramme) ont globalement les mêmes caractéristiques que dans le sang. Pas de granulations visibles

LAM 0 : blastes indifférenciés

Quelques érythroblastes évoquant des mégaloblastes intermédiaires

Grossissement intermédiaire
Persistance d’une plasmocytose modérée (5% au myélogramme) : quelques plasmocytes présentent des anomalies morphologiques nettes, d’autres non

LAM 0 : blastes indifférenciés

Les images suivantes montrent des blastes et des plasmocytes





Cytochimie de la myéloperoxydase : négative
(deux granulocytes résiduels fortement positifs)

Cytochimie de la myéloperoxydase
Les blastes ne présentent pas de signes de différenciation
Dysmégacaryopoïèse et dysérythropoïèse, sans dysgranulopoïèse.

Immunophénotype
Les blastes expriment les antigènes myéloïdes, sauf la myéloperoxydase, et pas les antigènes erythroïdes ou mégacaryocytaires.
Expression associée du CD 7 (immaturité) et à un faible degré de deux antigènes lymphoïdes B.

Biopsie ostéomédullaire : Faible grossissement
Augmentation de la richesse médullaire : on voit nettement de grandes nappes de cellules (grandes zones plus claires paraissant entourées d’une ligne de cellules plus denses)

BOM : fort grossissement
Infiltration dense, diffuse et massive par des cellules tumorales, ne laissant subsister que quelques ilots érythroblastiques et quelques mégacaryocytes

Les cellules tumorales sont de taille moyenne à grande, avec rapport N/C élevé et chromatine très fine, contour nucléaire arrondi ou discrètement irrégulier, avec nucléole de petite taille, évoquant des blastes.
Absence de plasmocytose excessive

On remarque au centre un sinusoïde médullaire (allongé en diagonale) rempli de cellules anormales
Bilan
Cytologie : profil de leucémie aiguë myéloïde (non monoblastique, non érythroïde, non mégacaryoblastique), conforté par la cytométrie en flux
Classification FAB : blastes myéloïdes non différenciés = LAM zéro avec la cytologie / cytométrie de flux
Etude cytogénétique: 46,XX, t(3;12)(q26;p13); del(7)(q33;q26) [21]
Etude moléculaire : absence de mutation FLT3 ITD ou D835, absence mutation NPM1.
Classification OMS 2008 : du fait des antécédents = LAM post – traitement (post-chimiothérapie)
(en l’absence d’antécédents la cytogénétique aurait permis le reclassement en LAM avec anomalies liées aux myélodysplasies)
Chez notre patiente l'évolution a été rapidement défavorable, avec décès dans les semaines suivant la découverte de l’hémopathie aiguë.
Les anomalies cytogénétiques retrouvées ici s'observent au cours des pathologies myéloïdes : syndromes myélodysplasiques et leucémies aiguës myéloïdes (tous types FAB), avec souvent dysplasie mégacaryocytaire, que ce soit celle impliquant le chromosome 3q (gènes EVI1 et MDS1) ou celle provoquant la délétion 7q
Ces anomalies cytogénétiques sont compatibles avec les effets d’agents alkylants et/ou d’une radiothérapie. Le traitement du myélome est peut-être en cause, bien que le délai et la durée de traitement soient courts (< 1 an).
Il est possible que les traitements antérieurs aient « sensibilisé » les cellules myéloïdes de la patiente (myélodysplasie a minima induite par le traitement anti cancer du sein ?), et que le traitement récent par par alkéran ait fait rapidement évoluer la situation.
On ne peut pas exclure chez cette patiente aux nombreux antécédents cancéreux un nouveau cancer (hémopathie aiguë dans le cas présent), mai sles anomalies cytogénétiques vont plutôt en faveur d'une LAM post traitement.
Ref. Lugthart S, et al. Clinical, molecular, and prognostic significance of WHO type inv(3)(q21q26.2)/ t(3;3)(q21;q26.2) and various other 3q abnormalities in acute myeloid leukemia. J Clin Oncol 2010;28:3890-389