Entité clinico-biologique caractérisée par un état hyperinflammatoire faisant suite à la dérégulation de la réponse immunitaire cytotoxique.
Parfois d’origine génétique (surtout découverts chez le petit enfant), le plus souvent secondaire et prédominant chez l’adulte dans un contexte d’immunosuppression, d’infection, de cancer ou de maladie auto immune (au-delà de 50 ans un cancer sous jacent est présent dans plus de la moitié des cas).
Le diagnostic n’est pas toujours facile, le traitement délicat et le pronostic péjoratif.
1. LHH d’origine génétique.
Environ 5% du total des LHH. Surtout diagnostiqués chez le petit enfant. Le décès est la règle sans traitement.
1.1.LHH primitive ou familiale.
Se rencontre le plus souvent avant l’âge de 1 an (médiane = 2mois), avec ou sans histoire familiale, parfois révélé suite à une infection. C’est une maladie récessive causée par la mutation de l’un des gènes d’importance pour la fonction cytotoxique médiée par les cellules NK et T cytotoxiques.
Il y a 5 formes de LHH familiales, dont 4 sont définies chacune par une mutation spécifique (Côte, 2009). Ces mutations provoquent un défaut de réponse cytotoxique et, de manière spontanée ou secondaire à une infection (essentiellement EBV), une réponse inflammatoire incontrôlée se déclenche : expansion d’un clone T sécrétant de fortes quantités d’IFN gamma, lequel provoque une activation des macrophages, lesquels libèrent de nombreuses cytokines pro inflammatoires (TNF alpha, IL1 bêta, …) qui provoquent des lésions tissulaires et une insuffisance d’organes :
- syndrome inflammatoire avec fièvre et AEG (hypothalamus), perturbations métaboliques,
- infiltration tissulaire avec syndrome tumoral (hépato-splénomégalie),
- hémophagocytose (= activation des macrophages), cytopénies.
1.2. Patients ayant un déficit immunitaire congénital.
Ils peuvent également développer un SAM, du fait d’une mutation d’un gène qui dérégule alors la fonction immune :
LYST (Lysosomal Trafficking Regulator ; syndrome de Chédiak-Higashi,
AP3B1 (syndrome de Hermansky-Pudlak),
RAB27A (syndrome de Griscelli type 2),
SH2D1A (syndrome lymphoprolifératif lié à l’X; XLP type 1 ; appelé aussi syndrome de Purtilo = susceptibilité accrue à l’infection EBV) ou BIRC4/XIAP (XLP type 2),
IL2RG (Déficit immunocombiné severe lié à l’X; X-SCID),
ITK (déficit en IL-2 inductible T cell kinase).
2. LHH (ou SAM) d’origine acquise.
Situation la plus fréquente.
2.1. Origine infectieuse (50% des cas).
Surtout virale (EBV, Herpes virus, VIH, CMV), parfois bactérienne ou fongique ou parasitaire.
S’observe chez les immunodéprimés (post-greffe de rein, de moelle osseuse, …) ou non.
2.2. LHH en association à une maladie cancéreuse (30-40% des cas).
2.2.1. Soit comme manifestation initiale d’une maladie cancéreuse.
- Hémopathies : 1% sont associées à un SAM (après 60 ans = LNH dans 2/3 des cas). Sont concernés : LNH-B et T au total 75% des cas ; LNH T ou NK, DLBCL, parfois Hodgkin), leucémies (6%), autres hémopathies (14%).
- Tumeurs solides au diagnostic = plus rares (5%).
- Physiopathologie.
Soit le processus tumoral en lui-même est en cause (DLBCL ++) : les cellules cancéreuses peuvent sécréter de l’IFN gamma, de l’IL6 ; on note aussi un taux élevé de sCD25 = marqueur d’activité T mais aussi de masse tumorale dans les LNH), soit un agent viral est impliqué (surtout EBV : certains LNH T, M Hodgkin).
2.2.2. Soit comme complication de l’immunosuppression liée à la chimiothérapie alors que les pts sont en rémission du cancer.
Survient qq soit la phase du traitement ; il est secondaire à une infection (bactérienne, virale, champignon).
2.3. Soit dans le cadre de maladies auto-immunes (5- 10% des cas).
Maladie de Still de l’adulte, polyarthrite juvénile, LEAD, diverses maladies rhumatismales. L’imputabilité des médicaments a parfois été evoquée.
3. Diagnostic.
Parfois difficile.
3.1. Critères du Groupe français des LHH (Janka 2012 ; GFLHH 2007) :
Critère 1 : diagnostic moléculaire ou de maladie familiale = surtout pour les formes pédiatriques;
Critères 2 : Cinq au moins parmi les huit critères suivants (surtout pour les formes acquises et de l'adulte, le contexte étant important : immunodépression, cancer, …)
- fièvre
- splénomégalie
- cytopénies sur au moins 2 lignées : Hb PLT Neutro
- ferritinémie > 500 µg/L
- hypertriglycéridémie > 3 mmol/L et/ou hypofibrinogénémie (
- récepteur soluble de l'IL2 (sCD25) > 2400 U/mL
- activité NK diminuée ou absente
- hémophagocytose (moelle, rate, ganglions)*
* : le myélogramme est indispensable pour affirmer l'hémophagocytose, mais au début celle-ci est absente ou minime dans 2/3 des cas ; la présence de cellules anormales (blastes, cellules de lymphome ou de tumeur solide) oriente d’emblée.
3.2. Autres critères.
- Augmentation des transaminases et de la bilirubine, des LDH, des D-dimères, LCR anormal (augmentation du Nb de cellules et/ou protéinorachie), CIVD.
- Ferritinémie : 500 – 200 000 µg/L (valeur > 10 000 µg/L : sensibilité = 90%, et spécificité = 96%)
- Rapport CD25/ferritinémie : si > 8.5 : en faveur de l’origine lymphomateuse du SAM
- CD163 soluble élevé = signe d’activation macrophagique
Pour les petits enfants, la LHH familiale est à envisager au cas par cas.
Pour les autres patients l’hypothèse d’un SAM associé à un cancer doit être toujours envisagée.
La combinaison de critères, l’étendue et la progression des anomalies cliniques et biologiques sont des critères très importants d’aide au diagnostic (chute de la N° PLT, augmentation de la ferritinémie)
L’anamnèse (patient ayant un cancer connu : chimiothérapie en cours ? rechute à envisager ?) le myélogramme (présence ou non de cellules tumorales) aident la démarche étiologique. La recherche d’une infection (EBV d’une part, bactérienne ou fongique d’autre part) permet d’envisager des traitements (anti-CD20 si infection virale, ATB si autres).
Un système de score est accessible en ligne (http://saintantoine.aphp.fr/score/)
4. Traitement.
Traitement de réanimation, traitement anti infectieux si agent identifié.
Maladie rhumatismale : immunosuppression (stéroïdes + ttt spécif de la maladie en cause)
Cancer : chimiothérapie de la tumeur en cause, incluant autant que possible de l’étoposide -(nhibe la topoisomérase II et provoque des cassures des doubles brins d’ADN)
Infection : antimicrobiens ; anti CD20 si EBV
LHH familiale : dexaméthasone + étoposide
Les cas réfractaires doivent être considérés pour l’allogreffe de CSH.
Pronostic : quel que soit le traitement envisagé, la mortalité à 30j est d’environ 30% et la mortalité totale dépasse 60%.
Octobre 2015
Références.
- Côte M et al. Munc18-2 deficiency causes familial hemophagocytic lymphohistiocytosis type 5 and impairs cytotoxic granule exocytosis in patient NK cells. J Clin Invest 2009;119:3765-3773.
- George MR. Hemophagocytic lymphohistiocytosis: review of etiologies and management. J Blood Med 2014;5:69-86.
- Gritta E et al. Hemophagocytis syndromes. An update. Blood Reviews 2014;28:135-142.
- Janka GE. Familial and acquired HLH. Annu Rev med 2012;63:233-246.
- Lehmberg K et al. Consensus recommendations for the diagnosis and the management of hemophagocytic lymphohistiocytosis associated with malignancies. Haematologica 2015;100:997-1004
- Ramos-Casals et al. Adult hemophagocytic syndrome. Lancet 2014;383:1503-1516.
- Schram AM & Berliner N. How I treat hemophagocytic lymphohistiocytosis in the adult patient. Blood 2015;125:2908-2914