Ce document fournit diverses informations morphologiques, phénotypiques, cytogénétiques et moléculaires concernant les :
LAM avec mutations géniques : FLT3, NPM1, CEBPA
LAM : les autres mutations géniques
Inclusions en coupelles (cup-like) et anomalies FLT3/NPM1
Anomalies hématologiques et trisomie 21 constitutionnelle
Panmyélose aiguë avec myélofibrose
Sarcome myéloïde
Tumeurs à cellules plasmacytoïdes dendritiques blastiques
Observations biocliniques commentées :
- Observation 13 (NPM1+) - Observation 14 (NPM1+, FLT3-ITD+) - Observation 26 (inclusions en coupelle)
- Observation 35 (FLT3-ITD +) - Observation 40 (CEBPA+) - Observation 44 (NPM1 +)
1. LAM et mutations géniques FLT3, NPM1, CEBPA
Des mutations somatiques acquises de nombreux gènes ont été identifiées, souvent dans les LAM à caryotype normal, mais parfois également dans d'autres groupes cytogénétiques.
Plusieurs anomalies géniques ont une signification pronostique; 3 gènes sont particulièrement étudiés : FLT3, NPM1 et CEBPA.
Les autres mutations géniques sont moins fréquentes ou ont un impact plus restreint.
1.1. FLT3
Localisé en 13q12; code pour un récepteur fms-like tyrosine kinase de classe III impliqué dans la différentiation, la prolifération et la survie (dim. de l'apoptose) des cellules souches hématopoïétiques
Exprimé sur les progéniteurs normaux et sur les blastes de la plupart des cas de LAM
Deux types d'anomalies géniques :
- Duplication en tandem interne (FLT3-ITD) dans le domaine juxta membranaire : la plus fréquente (1/3 des LAM à caryotype normal), et associée à un pronostic péjoratif. Elle est constamment recherchée dans les LAM à caryotype normal, et le ratio allèle muté/allèle non (= sauvage) est déterminé (survie + faible si forte Q d'allèle muté)
(mutations homozygotes : résultent d'une recombinaison génétique conduisant à une UPD partielle)
peuvent survenir dans tous types de LAM, et particulièrement : LAM avec caryotype normal (presque tous les types FAB)
LA promyélocytaires (surtout LAM3v)
LAM avec t(6;9)
Dans une partie des cas une inclusion en coupelle est observable dans une partie des blastes (voir dans le paragraphe : NPM1)
- Mutation ponctuelle affectant le codon 835 (+ rarement 836) du second domaine TK : pas d'impact pronostique [5-10 % des LAM; 11-14 % des LAM à caryotype normal; 20 % des LAM avec anomalie du chr 16]
Relations avec l'immunophénotype : les LAM FLT3-ITD + sont HLADR - dans 80 % des cas
plus fréquemment CD34 -
Impact pronosic péjoratif si mutation FLT3-ITD. Une greffe allogénique doit être envisagée. En cours d'essai : inhibiteurs de FLT3 + chimiothérapie.
1.2. NPM1
Les LAM avec mutation NPM1 constituent une entité provisoire au sein de la catégorie des LAM avec anomalies cytogénétiques (moléculaires) récurrentes (classification OMS 2008)
Gène NPM1.
Code pour la nucléophosmine, protéine navette entre le noyau et le cytoplasme. Une mutation du gène (dans l'exon 12 : au moins 40 mutations différentes) produit une délocalisation de la protéine qui devient cytoplasmique.
Lien cytomorphologique.
Les LAM avec mutation NPM1 sont principalement des LA myélomonocytaires ou monoblastiques, survenant de novo, chez des adultes, avec prédominance féminine.
Une forte hyperleucocytose est fréquente.
Une atteinte multilignée est fréquente.
Présence très fréquente d'inclusions en coupelle dnas une partie des blastes; (voir en fin de paragraphe)
Relations avec l'immunophénotype.
Défaut d’expression du CD34 (par down-regulation du gène CD34)
Souvent : forte expression du CD33
Fréquence.
Une mutation est observée dans 1/3 des LAM et environ 50-60 % des LAM à caryotype normal.
Dans quelques cas à caryotype anormal : les anomalies observées sont secondaires et différentes des anomalies cytogénétiques récurrentes des LAM [+8, +4, -Y, del(9q), +21]
Le profil d’expression génique montre un aspect particulier à ce groupe ; grande fréquence d’association avec la mutation FLT3-ITD.
Mise à part la mutation FLT3-ITD, la mutation NPM1 est mutuellement exclusive des autres mutations décrites dans les LAM, sauf de rares cas avec NPM1 et CEBPA mutés tous les deux
Impact pronostique.
Bonne réponse à la chimiothérapie d’induction et pronostic favorable quand la mutation est présente.
Chez les sujets jeunes, une mutation isolée de NPM1 en l'absence de mutation FLT3-ITD confère un pronostic comparable à celui des LAM avec t(8;21) ou avec anomalie du chromosome 16p.
Lorsque la mutation est associée à une mutation FLT3-ITD le pronostic est mauvais, mais moins que quand la mutation FLT3-ITD est isolée.
Inclusion en coupelle (cup-like).
Inclusion intracytoplasmique arrondie et translucide, de taille au moins égale à 25% du diamètre cellulaire et qui chevauche parfois le noyau ou le déforme;
constituée majoritairement de mitochondries agglutinées entre elles (visible en microscopie électronique), expliquant l’absence de coloration au MGG;
elle contient parfois des granulations azurophiles, voire un bâtonnet d’Auer (qui sont visibles au MGG);
selon qu'elle contient ou non des granulations primaires (visible sou non au MGG) elle est positive ou négative pour la myéloperoxydase
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L'inclusion est fréquente dans les divers types de LAM, notamment les LA à promyélocytes microgranulaires et hyperleucocytaires, les LAM 1 (parfois LAM 2), et les LA à composante monocytaire.
La présence de cette inclusion translucide dans > 10 % des blastes est retenue dans la littérature comme seuil de positivité.
Particularités des LA myéloïdes qui présentent cette inclusion :
- Caryotype : normal dans 85% des cas (si on exclut les LAM3)
- Lien moléculaire : on observe au moins 10 % de blastes avec inclusion en coupelle dans > 80% des LAM avec anomalie du gène NPM1 (nucléophosmine 1; répétitions en tandem interne dans le domaine juxtamembranaire ou mutations ponctuelles activant le domaine tyrosine kinase), et dans > 80% des LAM avec anomalies du gène FLT3 (le plus souvent FLT3-ITD, avec insertion ou délétion de 4-9 pb) [que les pts soient mutés FLT3 isolément ou doublement mutés NPM1 et FLT3].
- Particularités immunophénotypiques : expression absente ou faible de HLA-DR dans 60% des cas ; absence de CD34 dans 80% des cas.
Mais les LAM NPM1 + et FLT3-ITD sont en général CD34 –Positivité CD7 dans seulement 10% des cas.
- Taux globalement plus élevé de D-dimères (mais en incluant les LAM3 ?).
- Dans les quelques articles de la littérature qui l’ont recherché, il n’y avait pas de différence de survie globale entre patients ayant des blastes avec ces inclusions et ceux n’en ayant pas (différence de survie par contre liée à la présence ou non des anomalies NPM1 et ou FLT3-ITD).
Références.
Chen W et al. Blood 2006;108 :1783-4. Chen W et al. Cuplike Nuclei (Prominent Nuclear Invaginations) in Acute Myeloid Leukemia Are Highly Associated With FLT3 Internal Tandem Duplication and NPM1 Mutation. Cancer 2009;115 :5481-9. Falini B, et al. Multilineage dysplasia has no impact on biologic, clinopathologic, and prognostic features of AML with mutated nucleophosmin (NPM1). Blood 2010 ; 115 : 3776-86. Haferlach C, et al. AML with mutated NPM1 carrying a normal or aberrant karyotype show overlapping biologic, pathologic, immunophenotypic, and prognostic features. Blood 2009 ; 114 : 3024-32. Kussick et al. A distinctive nuclear morphology in acute myeloid leukemia is strongly associated with loss of HLA-DR expression and FLT3 internal tandem duplication. Leukemia 2004; 18 :1591-98
1.3. CEBPA
Les LAM avec mutation de CEBPA constituent une entité provisoire au sein de la catégorie des LAM avec anomalies cytogénétiques (moléculaires) récurrentes (classification OMS 2008)
Entité essentiellement pronostique : seules les mutations bialléliques sont concernées et ont un pronostic favorable.
Gène CEBPA (CCAAT/enhancer binding protein)
Code pour un facteur de transcription majeur du contrôle de la prolifération et la différentiation des progéniteurs myéloïdes.
Perte d'expression de la protéine CEBPA : secondaire à des mutations, des modifications post transcriptionnelles, des interactions protéine-protéine avec des protéines de fusion comme RUNX1-RUNX1T1 ou CBFB-MYH11, et également des modifications épigénétiques. Ces anomalies jouent un rôle critique dans la transformation leucémique.
Deux types majeurs de mutations ont été identifiés : mutations non sens dans la région N terminale (= isoforme tronquée avec effet dominant négatif) et mutations dans le cadre de lecture de la région C terminale leucine zipper (= diminution de la capacité de liaison à l’ADN ou de la dimérisation).
Dans 65% des cas les mutations C et N terminales sont bialléliques (= double mutations), majoritairement des hétérozygotes composites mutés en N term sur un allèle et en C term sur l’autre allèle), et le reste étant homozygotes (soit deux C term soit 2 N term) probablement par mécanisme de disomie uniparentale (UPD).
Lien cytomorphologique.
Les LAM CElBPA mutés sont des LAM1 ou LAM2 [>90% des cas], plus rarement des LAM4 ou M5 (myélomonocytaires ou monoblastiques)
Surviennent en général de novo
Dysplasie multilignées dans 25% des cas [aucun impact pronostique (idem pour l’entité « LAM avec mutation NPM1 »)]
Fréquence.
La présence d’une mutation intragénique de CEBPA survient dans environ 15 % des LAM à caryotype normal, et dans 40% des LAM avec del(9q) non impliquée dans un caryotype complexe.
Impact pronostique.
Les mutations confèrent un pronostic favorable, similaire à celui des LAM avec anomalie chromosomique 16 ou avec t(8;21)
uniquement si la mutation est bi-allélique (50 % des cas ; sinon = pas d’impact pronostique).
Une mutation FLT3-ITD [associée dans 30% des cas], ou DNMT3A fait perdre le bénéfice pronostique.
Remarque.
Si l’on découvre une mutation CEBPA ou une mutation NPM1 dans une LAM de novo avec dysplasie multilignées, mais sans anomalie cytogénétique de type SMD, l’OMS recommande de la classer en « LAM avec anomalies liées aux myélodysplasies, en mentionnant en plus l’existence de la mutation CEBPA ou NPM1 » [dans ces 2 entités l’impact pronostique est lié à la présence d’anomalies cytogénétiques défavorables, ou à l’existence de mutations géniques (FLT3-ITD ou DNMT3A), mais pas à la présence d’une dysplasie morphologique]
2. Les autres mutations géniques dans les LAM
KIT
Fait partie de la famille des récepteurs tyrosine kinase. Localisé en 4q11-12. Des mutations entraînant un gain de fonction sont décrites dans de nombreuses maladies (tumeurs gastro intestinales, tumeurs germinales, mastocytoses, et LAM).
Une mutation est retrouvée dans environ 25% des LAM à caryotype normal, mais elle est plus souvent associée aux LAM CBF :
Associée à la t(8;21) elle confère un mauvais pronostic
Associée à l'anomalie chromosomique 16p le pronostic est identique que KIT soit muté ou non.
On peut également retrouver une expression significativement augmentée (sans mutation ponctuelle).
MLL (maintenant KMT2A)
Le gène MLL (Mixed Lineage Leukemia) joue un rôle majeur dans la régulation de la transcription et l’expression des gènes HOX (gènes du développement). Il est localisé en 11q23.
Au cours des LAM :
- découverte d'une translocation t(9;11)(p22;q23) impliquant la juxtaposition de MLLT3 et MLL : fait classer la LAM en LAM avec anomalies cytogénétiques récurrentes (< 5 % des LAM, essentiellement LAM5)
- Pour toutes le sautres anomalies de MLL (translocations variantes, anomalies intragéniques de MLL (= MLL-PTD ou Duplication en Tandem Partielle) : 5-10% des LAM (souvent à caryotype normal, et dans 90% des LAM avec trisomie 11) = elles confèrent un pronostic défavorable (uniquement en analyse univariée).
On les classe dans la rubrique des LAM sans catégorisation particulière, en ajoutant l'anomalie ne cause (par ex : LAM avec t(11;19)(q23;p13.3) MLL-ENL
RAS
Les protéines RAS sont associées à la membrane, régulant les mécanismes de prolifération, différenciation et apoptose.
Mutation de N-RAS : dans environ 10 % des LAM à caryotype normal, 40% des LAM CBF (surtout avec inv(16)), et 15% des LAM avec inv(3)
Mutation de K-RAS : 15 ù des LAM CBF
Pas de signification pronostique connue
Mutations de JAK2 V617F
Gène codant pour une protéine à activité tyrosine kinase. Une mutation (V617F est la plus fréquente) est observée dans les syndromes myéloprolifératifs chroniques (SMP) on dans environ 5 % des cas de LAM : soit secondaires à un SMP, soit en association avec une t(8 ;21)
TP53
Gène suppresseur d etumeur localisé en 17p13. Il est exprimé en réponse à un stress cellulaire, et régule les gènes cibles qui induisent l'arrêt du cycle cellulaire, l'apoptose, la sénescence, la réparation d el'ADN, ...
Perte d'expression dans 60% des LAM et SMD avec caryotype complexe : la situation la plus fréquente d'inactivation de P53 correspond à une mutation inactivatrice sur 1 allèle associée à une délétion sur l'autre allèle. Elle est associée à un pronostic très péjoratif
Cytomorphologie. L'inactivation totale de P53 est asscoiée à une anomalie particulière des neutrophiles matures : au moins 5% des PNN (du sang et/ou de la moelle osseuse) ont un noyau arrondi ou ovalaire (non lobé), avec chromatine nettement condensée, et un cytoplame pauvre en granulations et souvent riche en vacuoles rondes et translucides. Cett anomalie est appelée Pseudo Pelger-Huët ou Pelger - Huët acquise. Elle est fugace et peut disparaitre en quelques jours, en dehors de tout traitement.
WT1
Le gène de la tumeur de Wilms en localisé sur le chromosome 11p13; il code pour un régulateur transcriptionnel qui agit comme activateur ou comme répresseur de la transcription selon : le type de cellule, l'isoforme (il y en a 4), et le gène cible. Il agit donc aussi bien comme gène suppresseur de tumeur que comme oncogène.
Au cours des LAM il agit comme oncogène, avec 2 types d'anomalies.
- Hyperexpression du gène : observée dans 70% des LAM [et 65% des LAL]. plus souvent les LAM à caryotype normal. Elle semble associée à un pronostic péjoratif après chimiothérapie standard (mais il existe des divergences entre LAM avant et après 60 ans, peut-être par une biologie différente des LA du sujet âgé)
La surexpression du gène a aussi un intérêt pour le suivi de la maldie résiduelle dans les LAM = l'évolution quantitative de l'expression de WT1 a un impact pronostique et permet de détecter précocement des rechutes (Yang et al. Leukemia 2007 ;21 :868-876. Renneville et al. Hématologie 2011;17:40-60)
- Mutation dans 15% des cas : facteur indépendant de pronostic défavorable dans les LAM à caryotype normal
Hyperexpression de BAALC.
BAALC (Brain And Acute Leukemia, Cytoplasmic) est un gène situé en 8q22.3, dont l'expression est restreinte au tissu neuroectodermique et au tissu hématopoïétique. Dans l'hématopoïèse l'expression est restreinte aux progéniteurs.
L'hyperexpression de BAALC dans les LAM est associée à un pronostic péjoratif (survie globale et survie sans événement) : elle est observée dans 50% des LAM, plus souvent quand le caryotype est normal ou avec trisomie 8 isolée. Elle est également plus souvent associée à une absence de mutation NPM1 et une expression importante de CD34 (Baldus et al. J Clin Oncol 2006;24:790-797)
TET 2
Anomalie retrouvée dans 10% des LAM, mais 23 % des LAM à caryotype normal
Habituellement non associée à des mutations de IDH1 et IDH2
Impact pronostique : controversé
DNMT3A
Anomalie retrouvée dans 15-20 % des LAM, mais 25 % des LAM à caryotype normal
Habituellement non associée aux anomalies CBF, CEBPA et MLL
Association plus fréquente avec les LAM à caryotype normal, les anomalies FLT3 ou NPM1
Impact pronostique : peut-être moins favorable dans les LAM à caryotype normal
IDH1, IDH2
Anomalie retrouvée dans 10 % des LAM, mais 30 % des LAM à caryotype normal
Habituellement non associée aux anomalies TET2 et WT1
Association plus fréquente avec les LAM à caryotype normal, les anomalies FLT3 ou NPM1
Impact pronostique : controversé
ASXL1
Anomalie retrouvée dans 10-30 % des LAM, et 10 30 % des LAM à caryotype normal
Plus rarement associée aux anomalies NPM1 et FLT3.
Plus fréquente chez les sujets âgés ; pronostic plutôt défavorable
BCR-ABL.
Les LAM à chromosome Philadelphie sont rares et pas totalement séparables des phases blastiques inaugurales de LMC : une entité a eté créée parmi les LA de lignée ambiguë
(voir : "classification OMS des LAL et LA de lignée ambiguë")
[ Références. - OMS 2008. IARC Press 2007. - Bacher U et al. Multilineage dysplasia does not influence prognosis in CEBPA-mutated AML, supporting the WHO proposal to classify these patients as a unique entity. Blood 2012;119(20):4719-4722. - Snaddon J et al. Mutations of CEBPA in acute myeloid leukemia FAB types M1 and M2. Genes Chromosomes Cancer. 2003;37:72-8. - Fasan A et al. PLOS One. 2013;8:e54365]
3. LA associées à la trisomie 21 constitutionnelle (syndrome de Down)
Dans la trisomie 21 constitutionnelle on observe :
- Avant l'âge de 4 ans autant de LAL que de LAM (mégacaryoblastiques dans > 60% des cas), alors que dans la population générale du même âge 90 % des LA sont des LAL
- Avant 5 ans le risque de développer une LAM est multiplié par 150, et 70 % de ces LAM sont des LA mégacaryoblastiques (alors que ce nombre n'est que de 5 % chez les non trisomiques)
- le risque élevé (> 10 fois) de développer une LA persiste à l’adolescence et l’âge adulte
Réaction leucémoïde transitoire ou myélopoïèse anormale transitoire : environ 10 % des nouveaux nés trisomiques 21 présentent ce type particulier de manifestation hématologique
3.1. Réaction leucémoïde transitoire ou myélopoïèse transitoirement anormale
Définition.
Situation unique de nouveau né trisomique 21 : tableau clinique et morphologique identique ou proche de celui d’une LAM. On l'appelle aussi syndrome myéloprolifératif transitoire.
Epidémiologie et aspects cliniques.
S'observe chez environ 10 % des nouveaux nés trisomiques, et de manière beaucoup plus rare chez les nouveaux nés présentant une trisomie 21 en mosaïque
Une hépatosplénomégalie est parfois observée ; les autres manifestations cliniques (insuffisance cardiaque, hyperviscosité,…) sont rares
Dans la vaste majorité des cas une rémission spontanée avec normalisation de l'hémogramme survient dans les 3 mois
Hémogramme
Anémie rare
Thrombopénie est fréquente
Leucocytose parfois très élevée (> 50 G/L), et le % de blastes dans le sang peut être > à celui retrouvé dans la moelle osseuse
Morphologie et immunophénotype.
L'aspect du myélogramme est superposable à celui des LAM du trisomique 21.
Les blastes sanguins et médullaires = le plus osuvent évocateurs de mégacaryoblastes (morphologie et immunophénotype)
Dans quelques cas : dysplasie mégacarycoytaire et érythroblastique, et excès de polynucléaires basophiles
Génétique
Des mutations acquises de GATA1 se retrouvent dans les blastes en plus de la trisomie 21
Pronostic
La rémission est spontanée dans les 3 mois, mais 25 % des enfants développeront une véritable LAM 1 à 3 ans plus tard
3.2. LAM associée à la trisomie 21
Définition
Dans > 60% = LA mégacaryoblastique.
Présentation parfois proche de celle d'un SMD avec excès de blastes, mais on regroupe ces formes particulières et les LAM avérées en un seul groupe
Epidémiologie et signes cliniques
Environ 1 à 2 % des enfants avec trisomie 21 développeront une LAM avant l'âge de 5 ans, et environ 25 % des trisomiques ayant présenté une réaction leucémoïde transitoire néonatale vont développer une LAM
La majorité des cas sont observés avant 3 ans
Une hépatosplénomégalie est presque constamment retrouvée.
Une phase pré-leucémique relativement indolente avec moins de 20 % de blastes médullaires est parfois observée et précède la LA
Hémogramme
Anémie, neutropénie.
Blastes sanguins = souvent des blastes indifférenciés, mêlés parfois de précurseurs érythroïdes
Anisopoïkilocytose très importante, avec parfois des hématies en larmes.
N° plaquettaire habituellement diminuée avec des plaquettes géantes
Moelle osseuse.
La phase pré-leucémique peut persister plusieurs mois et ressemble à une cytopénie réfractaire de l'enfance (voir dans le chapitre "syndromes myélodysplasiques")
Blastes = aspect indifférencié, certains contenant de volumineuses granulations ressemblant à des granulations basophiles : ces granulations sont généralement MPO négatives
Dysplasie érythroblastique importante avec mégaloblastose, formes bi ou trinucléées et fragmentations nucléaires
Des mégacaryocytes dysplasiques peuvent être observés. Dans certains cas la population mégacaryoblastique et mégacaryocytaire prédomine.
La dysgranulopoïèse est possible.
Parfois la fibrose réticulinique est importante et le myélogramme non réalisable : la BOM est nécessaire
Immunophénotype
Les blastes correspondent soit à des myéloblastes soit à des mégacaryoblastes (phénotype classique)
Génétique
En plus de la trisomie 21 des mutations somatiques du gène codant pour le facteur de transcription GATA1 sont pathognomoniques des réactions leucémoïdes transitoires et des LAM du trisomique
Après l'âge de 5 ans les mutations de GATA1 ne sont plus observées et on considère alors les hémopathies aigues comme des LAM conventionnelles
La trisomie 8 est très fréquente alors que la monosomie 7 est très rare
Pronostic
Bonne réponse à la chimiothérapie quand il existe des mutations de GATA1
Chez l'enfant plus âgé le pronostic est plus péjoratif
4. Panmyélose aiguë avec myélofibrose
Définition
Prolifération aigue panmyéloïde avec excès de blastes et fibrose médullaire qui ne remplit pas les critères d'une LAM avec modifications reliées aux myélodysplasies.
S'intitule également myélofibrose maligne.
Epidémiologie et clinique
Maladie rare de l'adulte, plus rare encore chez l'enfant, et qui survient de novo
Sur le plan clinique on observe une fatigue, faiblesse, de la fièvre et des douleurs osseuses. Absence de splénomégalie.
Hémogramme
La pancytopénie est constante.
Morphologie des GR presque normale, absence d'hématie en larme, macrocytose variable, et quelques érythroblastes circulants
Une discrète myélémie incluant des blastes peut être observée
Une dysgranulopoïèse est possible, ainsi que des plaquettes anormales
Moelle osseuse
La ponction aspiration est fréquemment impossible et la BOM est nécessaire pour le diagnostic
BOM : moelle riche avec panmyélose ; augmentation des précurseurs érythroblastiques, granulocytaires et mégacaryocytaires en proportions variables. La dysmyélopoïèse est d'importance variable. Les blastes (nb = 20-25%) sont dispersés ou regroupés en petits foyers
Les blastes sont des myéloblastes peu différenciées (MPO négative) mais aussi des pro-érythroblastes et des mégacaryoblastes
Génétique
Dans les rares cas où l'étude est réalisable on observe des caryotypes anormaux
Si on retrouve un caryotype complexe avec anomalie des chromosomes 5 et/ou 7 doit faire reclasser la maladie dans les LAM avec modifications reliées aux dysplasies
Diagnostic différentiel
Diagnostic positif souvent difficile
Il faut séparer cette maladie des LA mégacaryoblastiques, et la distinction avec la SMC, les myélofibroses après maladie de Vaquez ou TE est parfois très difficile
Pronostic
Pronostic péjoratif, survie faible, et peu de réponses à la chimiothérapie
5. Sarcome myéloïde
Définition
Masse tumorale formée de blastes myéloïdes avec ou sans maturation, localisée en dehors de la moelle osseuse : peau, ganglion, tractus digestif, os, tissu mou
Chez un pt présentant une SMD, un SMP/SMD, ou un SMP, sa découverte affirme l’évolution en LAM
Ils peuvent par ailleurs :
- coïncider avec une LAM,
- correspondre à la transformation blastique d'un SMD, d'un SMP, ou d’un SMP/SMD.
- correspondre à la manifestation initiale de la rechute d'un patient ayant une LAM
On utilise cette classe uniquement quand le sarcome précède le diagnostic de LAM (de novo), et sa détection doit être considérée comme l’équivalent d'un diagnostic de LAM
6. Tumeurs à cellules plasmacytoïdes dendritiques blastiques
Tumeurs dérivées des précurseurs des cellules plasmacytoïdes dendritiques., et donc de tumeurs myéloïdes. Appelées également lymphomes à cellules blastiques NK, ou tumeurs hématodermiques agranulaires CD4+, CD56+
Maladies rares pouvant survenir à tous les âges, mais surtout entre 60 et 70 ans. Elles impliquent constamment la peau ; la moelle osseuse et le sang périphérique sont impliqués dans 75% des cas et les ganglions dans 50% des cas
La maladie se présente initialement sous forme d'une lésion cutanée d'évolution progressive.
Blastes : taille moyenne, noyau irrégulier, chromatine fine et plusieurs petits nucléoles. Cytoplasme gris bleu et dépourvu de granulation ; on peut observer des microvacuoles cytoplasmiques le long de la membrane cellulaire et parfois un aspect en miroir à main
Immunophénotype : les blastes expriment les CD4, CD43, CD56, CD123 (récepteur de l'interleukine 3). Dans la moitié des cas, on retrouvera du CD7 et du CD33
Génétique : caryotype anormal dans 2/3 des cas : les caryotypes complexes sont fréquents et plusieurs translocations récurrentes sont décrites
Pronostic et évolution : maladie agressive avec une médiane de survie de un an
Septembre 2013